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Les données – ce qui se rapproche le plus de la magie dans le monde moderne

Yves Lombaerts, directeur des ventes SAP Belgium, a emmené notre Global Innovation Evangelist Timo Elliott pour une visite intéressante dans les bureaux de SAP à Bruxelles. Ils ont échangé sur la manière dont les petites et moyennes entreprises doivent aborder la transformation numérique et sur le rôle concret que les Data Protection Officers et les Innovation Evangelists jouent dans ce processus. « Nous avons déjà atteint le point de basculement où tout le monde a pris conscience que le cloud est l’avenir des systèmes informatiques », déclare Timo Elliott.

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Interview Timo Elliott

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Interview Timo Elliott

Yves : Le terme « évangéliste » est de plus en plus utilisé de nos jours. Quelle est votre fonction spécifique au sein de SAP ?

Timo : Je sais que ce titre peut parfois sembler un peu bizarre (rires). Mais pour l’essentiel, je peux le résumer ainsi : je travaille avec des entreprises sur des innovations avancées, je rassemble les leçons tirées de ces innovations et je partage ensuite ces connaissances avec le plus grand nombre de personnes possible.

Yves : Pour la Belgique en particulier, constatez-vous des différences entre notre marché et ceux des autres pays ?

Timo : J’aime venir en Belgique, car j’y découvre toujours de fantastiques projets d’innovation. En ce qui me concerne, la Belgique est en avance sur les grands marchés en matière d’innovation. Selon moi, la raison en est que les Belges sont habitués à être exposés à d’autres points de vue et cultures. Ils sont toujours très au fait des tendances internationales.

Yves : La Belgique regorge d’entreprises de taille moyenne qui n’ont pas toujours les budgets nécessaires pour investir massivement dans l’innovation. Quels conseils donneriez-vous à ces entreprises ?

Timo : La bonne nouvelle est que nous sommes au début d’un âge d’or pour les petites et moyennes entreprises. Grâce à la technologie du cloud, il n’est plus nécessaire d’être une grande entreprise pour voir les choses en grand. Une entreprise de dix personnes a désormais accès à la même puissance informatique que les grandes entreprises. Les petites entreprises sont donc en mesure de faire des choses qui étaient auparavant impensables.

Yves : L’intelligence des processus d’affaires (« business process intelligence ») devient-elle plus importante pour eux ?

Timo : Les entreprises ont de nombreuses possibilités d’innover. La décision la plus difficile à prendre pour elles est de savoir où commencer. Et en effet, la « business process intelligence » est l’un de ces domaines.

Un exemple : je souffre actuellement d’une blessure au genou. Mon médecin me demande donc de passer une IRM dans le but d’établir un diagnostic clair. « Tant que nous ne saurons pas quel est le problème, nous ne pourrons pas vraiment le résoudre », a-t-il déclaré.

Telle est la « business process intelligence ». Vous éclairez les processus d’entreprise de bout en bout à travers plusieurs applications et systèmes pour trouver où se trouve le point d’achoppement. Et si vous savez quel est le problème, vous pouvez réellement agir pour le résoudre. À l’avenir, il suffira d’appuyer sur un bouton, qui fera automatiquement apparaître une nouvelle partie du processus d’entreprise dans le cloud. Il s’agit donc d’un outil fantastique qui offre une multitude d’opportunités aux PME.

Yves : Pensez-vous que les gens soient déjà convaincus de la réelle valeur ajoutée de la transformation numérique ?

Timo : Certainement. Je travaille avec de nombreuses entreprises qui entreprennent des choses fantastiques. Vous savez, la frontière entre les données et la magie est très mince dans notre monde moderne. Vous créez quelque chose, à partir de rien. Vous pouvez utiliser les données pour améliorer les résultats des clients et réduire les coûts, et même, à terme, améliorer le monde. Les entreprises se rendent compte que tout le monde y gagnera. Et avec les dernières générations de technologies, tout devient beaucoup plus facile.

Yves : Certaines entreprises mettent également en place un « Chief Data Officer ». Quelle est sa valeur ajoutée ?

Timo : Il est vrai que leur nombre a considérablement augmenté. Indépendamment de leur titre exact et de la personne à laquelle ils doivent rendre compte, c’est leur rôle sous-jacent qui est important : utiliser le pouvoir des données comme un atout majeur pour l’ensemble de l’entreprise. L’idée est que ces personnes soient réellement au cœur des futurs processus d’entreprise.

De nombreuses entreprises ont investi des centaines de milliers, voire des millions d’euros, dans des systèmes de collecte de données, mais ont peu de chances d’en tirer le meilleur parti en termes de rendement. Parce que toutes ces informations sont dans des silos de données séparés. Le/La « Chief Data Officer » est donc une personne au sein de votre entreprise qui conserve cette vue d’ensemble et dont le rôle est d’intégrer ces données dans vos futurs modèles d’entreprise.

Yves : Vous voyagez beaucoup, vous rencontrez beaucoup de gens et d’entreprises…

Timo : Les voyages sont un peu limités en ce moment (rires). Mais j’échange avec beaucoup de gens sur Zoom.

Yves : Et quel projet actuel vous semble le plus intéressant ?

Timo : Farys est un projet belge intéressant. L’entreprise surveille la qualité de l’eau dans les différentes régions belges. J’ai récemment eu une conversation avec leur directrice des systèmes d’information (DSI), Inge Opreel, qui est en train de lancer une fantastique plateforme d’eau intelligente. Jusqu’à présent, ils pouvaient déjà surveiller les endroits l’eau fuyait de leurs canalisations. Ils peuvent désormais aussi voir pourquoi l’eau est perdue. Une fuite peut en être la cause, par exemple, ou l’utilisation par les pompiers de masses d’eau pour éteindre un incendie. Cet exemple illustre parfaitement ce que de nombreuses entreprises tentent aujourd’hui de faire : elles ne cherchent pas seulement à recueillir davantage de données, mais aussi à en faire un meilleur usage par la suite. Elles ont vraiment à cœur de comprendre ce qui se passe.

Yves : J’ai l’impression que de nombreuses entreprises pensent qu’elles peuvent utiliser les données à leur avantage en engageant des experts en science des données , des « data scientist ». Mais cela ne suffit pas, elles doivent d’abord centraliser leurs données.

Timo : Je crois beaucoup aux experts en science des données, mais ils sont aussi extrêmement coûteux. Et selon certains cabinets d’analyse comme Gartner, 85 % de tous les projets de transformation numérique échouent. C’est un terrible gaspillage de temps et de ressources.

Yves : Pourquoi tous ces projets échouent-ils ?

Timo : J’y vois deux raisons. Tout d’abord, les entreprises doivent investir davantage dans la qualité de leurs données. Vous devez contrôler vos métadonnées et veiller à ce que tout soit bien organisé. Pour faire évoluer votre base de données au niveau supérieur, vous devez d’abord passer par cette phase initiale douloureuse et difficile. Une fois que vous avez dépassé ce stade et que vous disposez d’une masse de données de qualité, les projets de données et l’apprentissage automatique peuvent être mis en œuvre assez rapidement et facilement. Le deuxième aspect sur lequel les entreprises échouent est l’industrialisation. Elles font souvent du bon travail dans un petit domaine, mais n’ont pas de vision d’ensemble. SAP essaie d’aider en intégrant l’apprentissage automatique dans chaque processus de gestion, afin que nos clients n’aient pas à le faire.

Yves : Pensez-vous que la transformation cloud offre également une valeur ajoutée aux entreprises qui souhaitent collecter davantage de données ou des données provenant de sources plus diverses ?

Timo : Nous sommes probablement parvenus à un tournant à cet égard. Il y a une prise de conscience générale que le cloud est l’avenir des systèmes informatiques. Toute personne travaillant dans l’informatique est probablement plus susceptible de perdre son emploi en ne mettant pas en œuvre les systèmes de cloud computing que l’inverse (rires). Lorsque je rencontre un sceptique, j’évoque souvent l’intelligence artificielle. Cela ne fonctionne que si l’on recueille des tonnes de données et que l’on y déverse une masse de puissance informatique. C’est un exemple parfait de quelque chose qui fonctionne tout simplement beaucoup mieux dans le cloud.

Yves : Revenons un instant sur l’aspect humain : qui doit gérer cette transformation cloud ? Les CIOs ?

Timo : La transition d’un CIO, en tant que Chief Infrastructure Officer vers une fonction de Chief Innovation Officer fut un processus de longue haleine. Tout CIO ambitieux désire naturellement être connu comme ce dernier. Mais il n’est pas nécessaire d’occuper une fonction informatique spécifique pour cela. Avant tout, vous devez être quelqu’un qui comprend exactement ce que la technologie peut faire pour ensuite la traduire en initiatives concrètes qui font avancer votre entreprise.

J’ai récemment eu une conversation passionnante avec Astrid Fontaine, CIO de Bentley Motors. Ce que j’ai trouvé si fascinant, c’est qu’en plus de son travail habituel, elle est également responsable des aspects commerciaux de la transformation numérique et des ressources humaines. Cela m’a fait prendre conscience que tout est question de gestion du changement. La transformation numérique est un processus que vous devez réaliser avec vos collaborateurs, et non quelque chose que vous devez leur imposer. Il s’agit de les impliquer pleinement dans le processus, sinon cela ne fonctionnera pas. C’est pourquoi, à Bentley Motors, ils ont tout réuni sous un même toit. Je pense que c’est l’avenir : c’est ainsi que la technologie et les affaires se rejoindront.

Yves : Qu’en est-il de l’entrepreneuriat durable ? Comment la transformation numérique peut-elle aider à lutter contre la crise climatique ?

Timo : Nous voyons déjà les conséquences du dérèglement climatique. Leur impact sur des secteurs tels que l’agriculture et les assurances est indéniable. Et malheureusement, ce type de phénomène se produira de plus en plus. Les entreprises doivent donc investir dans des plateformes qui permettent le changement.

Si vous optez aujourd’hui pour la durabilité, vous ne faites pas seulement ce qu’il faut, vous faites également un choix judicieux. Parce que, bien sûr, vos clients et vos collaborateurs sont engagés dans la durabilité. Notre tâche, en tant que professionnels de l’informatique, est donc de rendre les considérations de durabilité aussi simples que possible pour les professionnels, comme toute autre partie d’un processus d’entreprise. Par exemple, nous pouvons donner automatiquement à un concepteur l’empreinte carbone de certains produits qui l’intéressent, afin qu’il puisse faire les meilleurs choix pour l’entreprise, la société et le monde.

Yves : Quels thèmes pensez-vous que nous aborderons dans cinq ans, lors de notre prochaine rencontre ?

Timo : Je rêve d’intégrer l’innovation dans les processus d’entreprise fixes. Actuellement, nous considérons davantage l’innovation comme une série d’étapes distinctes et manuelles que nous suivons. Cependant, l’apprentissage automatique offre la possibilité de commencer à apprendre automatiquement. À l’avenir, nous serons en mesure d’améliorer progressivement tout processus d’entreprise, simplement parce que les gens l’utilisent. Telle la vision d’une entreprise intelligente.

Yves : Quels conseils aimeriez-vous donner à nos entreprises belges ?

Timo : Les modèles d’entreprise du futur sont basés sur des boucles de rétroaction numériques : collecter des données, améliorer les relations avec les clients, créer de nouveaux produits, puis le cycle recommence. Il y a beaucoup de petites et moyennes entreprises en Belgique et elles ont deux grands avantages : elles sont proches de leurs clients et elles sont flexibles. Elles peuvent changer plus rapidement que les grands groupes. D’un autre côté, les grandes entreprises ont aussi un avantage : elles disposent de plus de données – qu’elles peuvent utiliser pour consolider leur domination dans certains secteurs. C’est ce qui se passe aujourd’hui dans de nombreux secteurs. Toutefois, je suis fermement convaincu que les PME peuvent riposter en plaçant également les données au cœur de leur stratégie, puis en les utilisant aussi efficacement que possible.