Regards croisés entre Le Minh Tran Van, directeur associé et responsable de la Practice Business Intelligence chez CSC et Jean-Michel Jurbert, Business Development Manager SAP Cloud Platform chez SAP France
Quelle est votre vision du Big Data ?
Le Minh Tran Van, directeur associé et responsable de la Practice Business Intelligence chez CSC
Le Big Data est un phénomène indépendant de toute activité logicielle ou de service, dont il faut saisir les enjeux, les ramifications, les impacts pour les traduire en solutions et en processus via une bonne gouvernance et ce afin de permettre à l’entreprise d’obtenir un avantage compétitif. Il faut passer du stade d’une meilleure connaissance de ses clients et de ses produits, au stade où l’on peut prédire les évolutions de ses produits, de ses clients, et de son entreprise. On peut faire une analogie avec l’évolution du Web. À l’origine, de nombreuses entreprises se contentaient d’une plaquette en ligne. Puis elles ont ajouté de l’interaction, pour enfin développer de réelles applications. Et finalement, elles ont fini par établir des interconnexions entre leurs systèmes d’information et le cloud, en faisant évoluer leurs processus pour y parvenir.
Jean-Michel Jurbert, Business Development Manager SAP Cloud Platform chez SAP France
J’ajouterai à ces considérations que je partage, que la donnée est enfin considérée comme une source de productivité interne, mais également comme un levier d’évolution. Souvent, le Big Data est plutôt orienté vers le BtoC, puis vers le B2B. Toutefois, il incarne également de grands enjeux pour le B2E (Business to Employee). Ainsi, l’assistant Digital SAP Copilot suggère à chaque collaborateur des idées auxquelles il n’aurait peut-être pas pensé, en corrélant les informations structurées et non structurées de plus en plus nombreuses.
D’autres opportunités marquées Big Data proviennent de l’Internet des Objets. A partir de toute la réflexion que nous avons nourrie autour de l’Industrie du Futur, et parce que les technologies sont arrivées à maturité, nous détenons aujourd’hui un nouveau potentiel d’amélioration de la fiabilité du Système d’Information, mais aussi de transformation, passant d’une économie de produits à une économie de services.
Comment le Big Data profite-t-il aux utilisateurs métier de l’entreprise ?
Le Minh Tran Van
Il existe des différences majeures entre Business Intelligence (BI) et Big Data. Outre l’explosion des volumes, de nombreuses nouvelles technologies contribuent à endiguer et gérer au mieux le Big Data. Il s’agit à la fois de capturer, de collecter et de traiter le plus rapidement possible ces gros volumes d’informations. Traditionnellement, les utilisateurs exprimaient un besoin, qu’ils soumettaient aux personnes en charge du développement et dont il faisait la recette… Non seulement les délais étaient longs, mais le plus souvent l’application ne répondait qu’à une seule demande.
Aujourd’hui, le développement est accéléré via le prototypage progressif, à travers lequel le métier s’approprie ces technologies et peut voir très vite des résultats concrets.
Avec le Big Data, il devient possible de mieux examiner les usages, les comportements, et l’expérience client. Un travail facilité par ces gros volumes de données, croisées et corrélées afin d’obtenir des réponses plus pertinentes.
Jean-Michel Jurbert
Demain, les métiers de l’entreprise bénéficieront aussi pleinement de l’intelligence artificielle pour répondre à la question du type : comment appréhender ce que l’on ne sait pas ? Les technologies de stockage analytique et d’analyse, ainsi que les nouvelles interfaces utilisateur, amèneront une simplification qui favorisera la mobilité et l’accès aux données à tout moment, quel que soit le terminal d’accès.
Les nouvelles capacités ouvrent l’accès des technologies Big Data à tous les employés. Les métiers souhaitent la généralisation du Big Data pour favoriser la prise de bonnes décisions, permettre de mesurer les performances de chacun et sa contribution à la bonne marche de l’entreprise. Et il en va de même pour la relation avec le client et la mesure de sa satisfaction.
Désormais, beaucoup plus de fonctions de l’entreprise sont impactées par les décisions, celles-ci ne se limitent plus à quelques personnes.
Avec le Big data, le travail sur la donnée permet d’optimiser les processus métiers. L’entreprise évolue du “Process Driven” vers le “Data Driven”, aussi bien pour la logistique, que pour la production, pour la relation client, etc. Dans la stratégie SAP, HANA constitue la plate-forme technologique pour l’exploitation et l’analyse en matière de Big Data, avec l’objectif de concevoir des applications qui favorisent cette évolution.
Chez le chausseur en ligne Zalando, le Machine Learning intégré aux processus et aux systèmes améliore les algorithmes en continu, tandis que des data scientists assurent l’exploitation optimale des données. Alors, le directeur financier peut analyser chaque étape des processus liés à une commande pour prendre des décisions éclairées.
Pourquoi un partenariat entre SAP et CSC ?
Le Minh Tran Van
Dans ce partenariat, CSC apporte sa compréhension et sa connaissance des métiers des divers secteurs économiques, mais aussi sur les grandes fonctions de l’entreprise. Cela se traduit par des apports en consulting, en expertise technologique SAP, et par l’apport de data scientists.
Avec la BI, il s’agissait de concevoir un contenant (table, bases de données, flux…). Avec le Big Data, on s’intéresse de plus en plus à l’élaboration du contenu. SAP apporte des technologies de pointe et une couverture fonctionnelle complète. De plus, le portefeuille de ses solutions est totalement intégré pour répondre plus rapidement et plus efficacement aux attentes des clients. SAP fournit l’expertise à nos équipes, et nous maintenons un lien privilégié avec leurs laboratoires de Recherche et Développement.
Hadoop apporte une solution pour un stockage indexé à prix très compétitif, qui a démocratisé ce type de technologie ouverte. Toutefois, pour rechercher, indexer, et retrouver des informations, d’autres technologies sont nécessaires. C’est ici qu’intervient SAP HANA, apportant l’intelligence de l’analyse et des performances inédites grâce au traitement en mémoire. SAP HANA et Hadoop sont complémentaires. D’ailleurs HANA Vora fait le lien entre ces deux technologies. Ce qui prouve que SAP a anticipé tous ces cas d’usage.
Avec SAP HANA, nos équipes gagnent en agilité au grand bénéfice des métiers qui peuvent s’affranchir de multiples interventions informatiques sans grande valeur ajoutée, consommatrices de temps et potentielles sources d’erreur : traitements divers, nombreuses agrégations, batchs nocturnes générant des situations figées, etc.
Autre dimension intéressante, les utilisateurs métier peuvent maintenant se tromper, modifier, et recommencer sans que cela porte atteinte au Système d’Information, ou ne soit considéré comme une erreur ou une faute.
Quels liens peut-on établir entre Big Data et Transformation Digitale ?
Le Minh Tran Van
La promesse de la transformation digitale consiste à rendre la technologie mobile accessible par tous, à tout moment et en toutes circonstances. De plus, elle doit faire en sorte que chacun soit traité comme s’il était unique et qu’il avait toujours été connu par l’entreprise : client, employé ou partenaire. Les technologies Big Data favorisent ce traitement individualisé, sans importuner le client avec des propositions qui ne lui conviendraient pas.
Cette individualisation vaut également dans le Machine-to-Machine. Ainsi, une révision automobile au bout de 20 000 km parcourus n’est pas forcément pertinente pour tous les conducteurs. Grâce au Big data, une application détecte le niveau d’usure des composants en plus de la distance ou des modes de conduite, afin de déterminer à quel moment le véhicule doit être révisé. Un traitement sur mesure pour une expérience utilisateur unique.
Autre dimension importante, la transformation digitale nécessite une évolution profonde des processus, voire leur redéfinition complète. Ainsi, le Big Data permet de mettre en œuvre une maintenance prédictive pour détecter qu’un essieu va bientôt casser. Toutefois, dispose-t-on des pièces nécessaires dans le stock pour le changer ? Le spécialiste pour cette réparation est-il disponible ? Cela reste-t-il vrai si l’engin se trouve dans un autre endroit géographique (avion, navire, etc.) ?… On comprend alors qu’il faut revoir tout le processus pour le rendre agile, adaptable. Au passage, il convient aussi de définir une meilleure planification, un meilleur approvisionnement, et d’engager une discussion avec les métiers dans le cadre de cette optimisation. Attention : tout cela arrive très vite.
Jean-Michel Jurbert
De nombreux projets Big Data incarnent l’amorce de l’évolution vers la transformation digitale de l’entreprise. Cependant, la direction générale doit absolument porter ce projet de transformation, et le placer sous la responsabilité du comité de direction.
Il ne s’agit pas ici de projets de migration d’un ERP ou de tout autre logiciel, mais bien d’un projet de transformation des métiers et du Système d’Information. Une vague de fond qui profite à tous et permet d’élever le niveau de maturité sur le digital, le cloud, la mobilité, l’Internet des Objets… Une convergence de toutes ces technologies qui portent cette réelle transformation.
Dans cette nouvelle donne, les équipes de la DSI maintiennent le patrimoine applicatif, tandis que les métiers deviennent les moteurs de la transformation. Toutefois, la DSI doit se montrer agile et réactive pour permettre de concrétiser cette évolution incontournable. Elle doit s’adapter à la demande et ne plus se contenter de faire “tourner la machine” en la faisant évoluer au rythme des versions logicielles.
Il s’agit réellement d’une transformation continue et irréversible, nécessitant de nouvelles compétences et donc une formation des employés, une évolution dans laquelle la DSI doit également s’inscrire.