Pour un fabricant de dispositifs de micro-irrigation, SAP a bâti un scénario d’analyse prédictive alimenté par des données IoT, afin d’améliorer la qualité des produits en sortie des lignes de production.
À l’occasion du salon Big Data, qui s’est tenu les 11 et 12 mars 2019 à Paris, SAP a présenté un scénario d’usage de la technologie combinant IoT et Big Data, scénario mis en œuvre chez un fabricant de solutions de micro-irrigation. Cette technique de développement durable, adaptée aux régions arides, permet de faire couler l’eau goutte à goutte au pied des plantes. Les agriculteurs peuvent ainsi réduire leur consommation d’eau de 30 à 50 %. Le dispositif repose, pour l’essentiel, sur des petits tubes, percés à intervalles réguliers.
Un des principaux acteurs de ce marché était confronté à des problématiques de fluctuation de la qualité des tubes sortant de ses usines. Pour répondre aux exigences du fabricant, ces derniers doivent en effet respecter des caractéristiques précises sur le diamètre ou l’épaisseur. Les tubes non conformes pouvaient être recyclés, mais le taux de perte restait cependant élevé.
L’entreprise savait que son processus de production pouvait être amélioré : cet espoir provenait d’un opérateur, qui se distinguait par une qualité constante sur les lignes où il travaillait. Ce dernier ajustait les réglages en se fiant à son intuition et à son expérience. Mais pour généraliser ce niveau de qualité, encore fallait-il parvenir à formaliser ce savoir-faire.
Exploiter les données IoT via l’analyse prédictive
Le fabricant a alors décidé d’entamer une démarche d’amélioration continue pour résoudre ce problème de qualité. L’objectif ? Parvenir à une meilleure compréhension de son processus de production, ce qui contribuerait aussi à réduire ses coûts de fabrication. Pour cela, l’entreprise a misé sur les données issues des capteurs IoT installés sur ses lignes de production. Avec la volonté de bâtir une application mobile destinée à ses opérateurs, une app capable de suggérer en temps réel les réglages à appliquer sur la ligne.
Après avoir évalué l’offre d’un premier éditeur, l’entreprise s’est rapprochée de SAP, et lui a proposé de réaliser un Proof of Concept (PoC) sur la base de ses solutions d’analyse prédictive. Avant d’aller plus loin, les data scientists de SAP se sont penchés sur un jeu de données de production pour évaluer la faisabilité du projet. Les premiers résultats affichaient un taux de pertinence des recommandations de 50 %. Après une première itération, ce taux a grimpé à 70 %, laissant entrevoir un bon potentiel d’amélioration.
Un PoC abouti en quatre semaines
En septembre 2018, SAP se lance. Le PoC démarre. En quatre semaines, l’équipe réussit à bâtir une solution répondant aux besoins du fabricant. Le projet s’est déroulé sur deux fronts, en parallèle : la mise en place de l’environnement de collecte des données d’un côté ; l’élaboration du modèle prédictif de l’autre.
Les données proprement dites proviennent de capteurs IoT positionnés sur les équipements de production ; chaque ligne comportant environ une dizaine de machines, chacune dotée de plusieurs capteurs. Mais, pour interpréter ces données brutes, encore faut-il récupérer des informations de contexte. « Une température seule n’apprend pas grand-chose », fait observer Rémi Astier, architecte senior chez SAP. Ces données de contexte sont puisées dans le système de gestion de production (MES), qui gère le paramétrage des lignes, ou dans l’ERP. Elles apportent, par exemple, des informations sur les lots en cours de production ou des précisions sur le procédé de fabrication, comme les matériaux utilisés.
Pour rapatrier les données, un agent de Data Provisioning a été placé dans l’usine. Un connecteur vers le Cloud SAP, dont disposait déjà l’entreprise cliente, complète l’architecture de collecte. Au final, celle-ci gère un flux de données connectant l’environnement du client et la plateforme Big Data utilisée pour les analyses, construite sur la base de technologie In-Memory SAP HANA. Au-dessus de celle-ci, les différents services nécessaires au traitement des informations, notamment les services IoT de Leonardo et SAP HANA, ont été provisionnés. Dernière étape technique, la création de l’application mobile, volontairement simple, avec une interface bâtie sur la technologie SAP Fiori.
Replacer les données brutes dans leur contexte
De son côté, l’élaboration du modèle prédictif a démarré par la création du jeu de données d’apprentissage. « Il a fallu recréer le contexte et labelliser les informations, afin d’indiquer à la machine ce qui était considéré comme bon ou pas », explique Rémi Astier. Ce travail de préparation est nécessaire pour que les algorithmes de Machine Learning puissent commencer à analyser un jeu de données.
Dans le jeu de données initial, il manquait toutefois les paramètres utilisés pour la configuration, comme les réglages de température. Or, lorsque ceux-ci sont modifiés, les capteurs enregistrent des fluctuations peu de temps après, en raison de la latence de la ligne. Un simple horodatage ne suffit donc pas pour profiler les données, d’autant que celles-ci sont produites en continu : pour les data scientists, la vigilance est donc de mise à certains moments, comme lors d’un changement de lot ou de réglage. Pour savoir si certains de ces événements ont des répercussions sur la qualité des produits, il faut pouvoir les identifier.
Quand, à force de tâtonnements, l’équipe de SAP aboutit à un modèle jugé enfin suffisamment pertinent, celui-ci est mis en œuvre sur l’environnement technique, qui fédère les flux de données venant de la production. « Le PoC a été validé en conditions réelles : pendant toute une journée, les opérateurs ont utilisé l’application sur tablette et appliqué les réglages recommandés ». Pour des résultats probants : en effet, les algorithmes élaborés par les data scientists sont en mesure d’expliquer une bonne partie des déviations rencontrées en sortie de production.
Pour tenir les délais de ce projet, le Cloud a joué un rôle décisif. « Cela nous a permis de provisionner les environnements du premier coup », relève Rémi Astier. L’usage d’une solution dans le Cloud a aussi facilité le passage à l’échelle, l’entreprise pouvant tester l’application sur un petit périmètre, avant d’étudier son extension au besoin. Dans le monde industriel, cette souplesse de déploiement est importante, car le personnel en usines dispose de peu de temps pour les projets.
L’adoption des outils prédictifs par la pédagogie
Le travail conjoint des équipes SAP avec les techniciens fait également partie des facteurs de succès de ce projet. Il fallait en effet éviter que les opérateurs ne rejettent des recommandations émanant d’un iPad. Pour obtenir leur adhésion, d’importants efforts pédagogiques ont été entrepris. L’équipe de SAP est allée à la rencontre des opérateurs pour les interroger sur le réglage des machines : un travail amont qui a contribué à l’acceptation. Dès lors que les opérateurs ont vu dans l’application mobile un outil à leur service, et non un automatisme appelé à les supplanter, le projet a reçu leur approbation.